Synthèse et rapport national 2019

L’objectif général du projet ECOSCOPA est de mutualiser et d’inscrire dans la durée les dispositifs d’observation actuel basés sur une trame d’écosystèmes côtiers hérités des projets RESCO et VELYGER et d’y ajouter progressivement de nouveaux indicateurs physiologiques et environnementaux d’intérêt pour l’huître creuse. Cet observatoire national fournit ainsi chaque année une analyse réactualisée de l’état général et des performances de l’huître creuse en lien avec les pressions environnementales pour chaque phase clés de son cycle de vie (croissance, reproduction, vie larvaire, recrutement, survie).

En termes pratiques, cet observatoire national propose les produits suivants :

- constitution de séries temporelles biologiques uniques permettant d’analyser l’effet de l’environnement hydro-climatique sur la biologie d’une espèce modèle en milieu marin (notion d’invertébrés marins « sentinelles ») ;

- acquisition de données de référence sur l’état physiologique de l’huître creuse et l’état de santé global des populations dans des écosystèmes conchylicoles contrastés ;

- aide à la décision dans le cadre d'anomalies biologiques, de calamités agricoles, d'études d'impacts, d’utilisation du DPM ; 

- développement et validation de nouveaux marqueurs biologiques d’intérêt qui pourraient être mis en œuvre en routine dans l’observatoire ;

- socle national opérationnel et réactif de suivis standardisés sur lequel des études ponctuelles peuvent rapidement facilement être mises en œuvre.

Pour l’année 2019, il ressort les faits marquants suivants.

Sur le plan des facteurs environnementaux, l’année 2019 est au troisième rang des années les plus chaudes sur notre territoire depuis 1900. Elle se caractérise, à l'exception du printemps, par des températures toujours au-dessus des normales quasiment tout au long de l'année et par un très fort contraste au niveau pluviométrique, avec une première moitié de l'année particulièrement sèche et un dernier trimestre très pluvieux. Au plan biologique, ces conditions hydro-climatiques générales ont eu comme principales répercutions: (1) une croissance printanière et une maturation dans les normales corrélativement à la concentration en phytoplancton, (2) une ponte principale précoce compte tenu des fortes anomalies thermiques positives en début d’été puis (3) un développement larvaire globalement favorable. En conséquence, l’année 2019, à quelques exceptions près, se caractérise par un captage modéré à excellent s’échelonnant autour de 26 naissains/coupelle (Bassin d'Arcachon) à plus de 2000 naissains/coupelle pour certains secteurs de Rade de Brest. Sur ce secteur d'ailleurs, il s'agit des meilleurs scores enregistrés depuis le début des suivis.

Sur le plan de la survie moyenne des populations, les suivis de l'année 2019 n’ont pas pu aboutir, puisque l’ensemble des lots a été détruit à la mi-Juin, pour des raisons sanitaires. Néanmoins, les résultats préliminaires semblent montrer des tendances initiales comparables à celles observées les années précédentes, avec des débuts de mortalités assez forts sur les lots de naissain, tandis que les lots de 18 mois et de 30 mois étaient toujours épargnés au moment de l’arrêt du suivi. La cinétique d’apparition des mortalités observées pour les lots de naissain semblait montrer des hausses de mortalité plus tardives que les années précédentes, qui peuvent être liés aux caractéristiques hydro- climatiques de l’année 2019 (printemps plus frais).

Sur le long terme, le réseau VELYGER, a permis de cerner depuis 10 ans les grandes causes de variations du recrutement de l'huître creuse en France. Elles sont rappelées brièvement ici : 

- Pour la Rade de Brest (mais aussi la Baie de Vilaine), le facteur limitant du recrutement réside principalement dans la température estivale, une température de l’eau supérieure à 21°C en août assure un recrutement fort.

- Pour la Baie de Bourgneuf, ce constat est aussi valable, mais ce site présente en outre des temps de

résidence des masses d’eau assez courts, ce qui augmente les risques de dispersion larvaire et de faible recrutement en cas de conditions hydroclimatiques défavorables.

- A l’inverse, les Pertuis Charentais, et surtout le secteur Charente, bénéficie d’une circulation hydrodynamique favorable à la rétention des larves et le recrutement y est généralement modéré. Les bancs sauvages situés en amont, plus au nord, sont à préserver.

- Pour le Bassin d’Arcachon, la fécondité plus restreinte, le décalage progressif de la date de ponte, une évolution dans la localisation des bancs de géniteurs, des pressions anthropiques accrues font partie des causes avancées pour expliquer l'augmentation de la variabilité du recrutement. Dans cette configuration actuelle, seuls les étés chaud garantissent un bon recrutement.

- Pour la Lagune de Thau, bien que la fécondité soit faible (en lien avec une faible concentration en phytoplancton), les températures estivales et les temps de résidence des masses d’eau très élevés garantissent de très fortes abondances larvaires. Le succès du recrutement reste lié, dans cet écosystème sans marée, à l’optimisation des pratiques zootechniques nécessairement spécifiques.

Enfin, concernant le développement de nouveaux descripteurs écophysiologiques, un effort particulier cette année a été poursuivi pour suivre la température dans l'huître et à sa proximité immédiate sur l'estran. Ce développement technologique continuera dans les années à venir afin de mieux étudier la tolérance thermique de cette espèce remarquable d'estran.

Le rapport national 2019 est téléchargeable ici :